Action du 16 juin 2007



Samedi 16 juin 2007


Nous diffusons un tract (voir son texte intégral ci-dessous) à la Marche de la Visibilité Homosexuelle, Bisexuelle et Transgenre de Strasbourg.



Communiqué de presse



TaPaGeS a participé, pour la troisième année consécutive, le samedi 16 juin à la Marche de la Visibilité de Strasbourg dont le mot d'ordre était « Prévention, Égalité : maintenant des actes ! » Le tract de TaPaGeS peut être consulté à l'adresse : http://tapages67.org/_pages/actions/act_20070616.html. Un stammtisch (repas convivial) organisé par TaPaGeS aura lieu le samedi 23 juin à 20h30 au restaurant Cappadoce (15 rue Kuhn à Strasbourg). Rencontrons-nous ! Discutons ! Inventons nos futurs complots et nos imminentes échappées...



Tract


Tu es si belle et heureuse



S'agit d'être heureux/-se ! Et de le dire ! L'heure n'est ni à la plainte ni à la revendication. D'ailleurs, que dire d'autre à part notre bonheur ? Têtu, la Pravda de la bourgeoisie LGBT, nous l'a dit : « on a gagné ». Prière de communier dans l'allégresse, la jouissance en bandoulière. Et pourtant, ce bonheur qu'ils nous offrent, promettent, préparent n'est pas le nôtre. Rabougri, individualiste, morne et normé, il nous terrifie. Il est fait de tant d'abandons, de tant de compromis... Tout pour sa gueule dans un joli placard doré.

Un bonheur bien français : la tendance est à l'« identité nationale ». Le bonheur ne s'exporte pas. Comme le nuage de Tchernobyl, il s'arrête aux frontières. Nos sœurs sont tabassées par les fascistes, inquiétées par les flics, discriminées par les hiérarchies religieuses. C'est ballot, mais n'avaient qu'à naître Françaises. L'étranger, c'est pour le tourisme. Pas pour la solidarité politique. C'est pas qu'on soit égoïste : on est super généreux/-se même. On donne chaque année pour le Sidaction, on est contre les tsunamis et la misère. Mais voilà, c'est comme ça, c'est pas d'bol. Y a des pédés qui sont Français et d'autres qui sont Polonais... Et pourtant, question droits-de-l'homme, on est irréprochable. C'est même notre label. Questions droits de la femme c'est pas terrible, certes. Mais on a failli avoir une femme présidente... C'est dire si on est évolués. Donc : on est super fortEs sur les droits-de-l'homme.

D'ailleurs, nos commissariats sont impeccables vis-à-vis de la jeunesse des quartiers populaires. Nos préfectures sont admirables vis-à-vis des immigréEs. Certes, nos amantEs sans papierEs sont expulséEs - leurs amiEs aussi - par la police de Sarkozy ; les putes et les toxicos sont pourchasséEs, les militantEs pénaliséEs, criminaliséEs. De ceux/celles-là il est recommandé de s'en foutre. De passer son chemin. Une vie est, paraît-il, solitaire : elle se construit dans l'indifférence, avec son clan, ceux/celles qui nous ressemblent. Le bonheur, d'accord, mais toutE seulE, dans son coin. Et surtout sans politique. La politique c'est pas bien. C'est du conflit, des rapports de force, des contradictions, des oppositions. La politique, c'est refuser la fatalité. Refuser de vivre comme on vit. Croire que ce n'est pas naturel. Et inchangeable. Faire de la politique, dans ces conditions, c'est refuser de souscrire à ce monde ; c'est considérer Vanneste, Benoît XVI, Boutin, Pécresse et Ollier etc. comme des ennemis ; c'est s'échapper de la logique mièvre de la tolérance, du « à chacun-ses-opinions » pour lui opposer celle de notre émancipation. Mais pour être vraiment heureux/-se, il ne s'agit pas d'en rester là, nationaliste, solitaire et neutre. Il faut aussi être re-co-nnai-ssantE. On t'accorde des sous-droits ; la Loi, elle-même, te dit que tu ne vaudras jamais unE hétéro ; on psychiatrise les trans' ; on ignore toute prévention de l'homo/bi/transphobie : eh bien tu es priéE de dire merci. Car c'est la grandeur de la République : elle est mère de tous les citoyens (du moins ceux qui sont hommes, blancs, hétéros, cadres, chrétiens ou apparentés, en bonne santé). Et s'agit pas de demander plus. Un jour peut-être tu auras le droit au mariage. C'est énorme, non ? Ton côté trans/pédé/gouine est comblé. Jouis de ce bonheur à venir. Et oublie, un temps, que tu es précaire, chomeur/-se, salariéE, retraitéE. Car ce bonheur ne connaît pas la lutte des classes. Faut savoir sacrifier ses minima sociaux, renoncer au droit à la santé pour relancer la croissance (et dieu sait que rien au monde ne te tient plus à cœur que de relancer la croissance !) Le bonheur est inséparable du bonheur du Capital. Celui-ci parfois est un peu barbare, comme en Afrique, qui crève du cynisme de l'industrie pharmaceutique (et de la haine papale). Les excès ce n'est pas bien : le bonheur exige de la modération.

Comme dans ta vie, d'ailleurs : la plus transparente possible. Bien dans les clous. Une vie de transpédégouines consommateur/trice : tu n'as plus de désirs ? On t'en crée. De bien beaux, marchandisés. Comme ça tu as les mêmes que ton/ta voisinE. « Nous sommes deux sœurs jumelles, nées sous le signe »... Un bonheur capitalisable de petitE-épargnantE ou de petitE-propriétaire. UnE bonNE transpédégouine est unE transpédégouine qui ressemble à unE hétéro qui lui/elle-même ressemble... Ne crie pas, ne mords pas, n'exige rien. Sois heureuse et trouve-toi belle dans ton miroir.



Quand tu es en colère



De ce bonheur concédé, nous ne voulons pas !
Nous voulons plus. Nous voulons autre chose. Nous voulons tout.
Nous sommes acariâtres et malpoliEs.
AigriEs : nous n'avons qu'une vie et celle-ci ne nous plaît pas.
Nous sommes en colère.
Ce n'est pas très esthétique.
De toute manière nous ne sommes pas esthétiques : trop grosses, trop maigres, trop grandes, trop petites, trop poilues, trop glabres, trop jeunes, trop vieilles, trop masculines, trop féminines...

Des fois, bien sûr, nous sommes heureux/-ses. Nous découvrons l'intensité du bonheur dans nos luttes, dans nos plans cul, dans l'affection de nos amantEs.
Lorsque nous sommes ensemble, graves, insouciantes, grotesques et intraitables.
Mais ça ne nous suffit pas : nous sommes insatiables.

À TaPaGeS, nous essayons, même si c'est dur, de construire collectivement le bonheur, le bonheur en-deçà duquel nous resterons toujours insatisfaites et coléreuses. Parce que c'est cela qui nous rend belles aux yeux de nos amantEs.

Ce bonheur nous n'en avons pas le mode d'emploi, tout juste quelques intuitions. Et quelques certitudes quant à nos combats : ce que nous obtenons n'est que le résultat de nos luttes. Des luttes internationalistes, anti-patriarcales, anti-capitalistes, égalitaristes et universalistes.

Rencontrons-nous ! Discutons ! Inventons nos futurs complots et nos imminentes échappées...


STAMMTISCH (repas convivial) TaPaGeS : le samedi 23 juin à 20h30 au restaurant Cappadoce, 15 rue Kuhn à Strasbourg



TaPaGeS, le 16 juin 2007
Transpédégouines de Strasbourg






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