Action du 17 juin 2006



Samedi 17 juin 2006


Nous diffusons un tract (voir son texte intégral ci-dessous) à la Marche de la Visibilité Homosexuelle, Bisexuelle et Transgenre de Strasbourg.



Communiqué de presse



TaPaGeS a participé le samedi 17 juin à la Marche de la Visibilité de Strasbourg dont le mot d'ordre était cette année "Homo- trans- biphobie, STOP à l'hypocrisie !" Le tract de TaPaGeS peut être consulté à l'adresse : http://www.tapages67.org/pages/actions/act_20060617.html. Une réunion publique de TaPaGeS aura lieu le lundi 26 juin à 20 h au sous-sol du bar La Perestroïka, 2 rue Thiergarten à Strasbourg. Rencontrons-nous ! Discutons ! Inventons nos futurs complots et nos imminentes échappées...



Tract


TANT D'AMOUR !
(ILS /ELLES NOUS AIMENT TELLEMENT !)



Chirac, le premier. Il le répète en boucle : il est contre les discriminations. D'ailleurs il a créé la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Égalité des chances). Un truc qui sert à pas grand chose, qui dès l'origine a exclu les trans' et qui prendra bien garde à ne surtout pas se retourner contre la République qui l'a créé. République qui est pourtant la première machine à discriminer en France. Le droit au mariage ? À la parentalité ? Pas pour nous. Nous ébranlons (chouette !) l'Ordre symbolique, la famille, valeurs sûres de nos sociétés inégalitaires et violentes. Pas touche au socle même de l'hétéropatriarcat. La Loi hiérarchise les sexualités et les unions. Elle a décidé que certaines étaient supérieures à d'autres et tout en découle. Chirac est donc contre les discriminations et pour les Droits de l'Homme. Droits de l'Homme mais attention : pas droits du pédé, de la gouine et de la/du trans'. L'universel s'arrête là où nos désirs commencent ! Et de fait : pas un mot ne sera dit lorsque deux gamins sont pendus cet été en Iran parce qu'ils s'enculent, pas un mot à l'encontre de la politique homophobe de l'État polonais et de l'extrême-droite au gouvernement, quelques mots frileux et qui n'engagent à rien à propos des violences policières et fascistes contre nos sœurs moscovites...

Villepin, lui aussi, est pour les Droits de l'Homme et contre les discriminations ; d'ailleurs, c'est bien simple : ils sont tous pour les Droits de l'Homme et contre les discriminations... Villepin propose donc d'officialiser la Journée Internationale contre l'Homophobie (IDAHO). Trop gentil ! Ça permettra peut-être de masquer l'inaction criminelle de l'État en matière de prévention de l'homophobie, de la lesbophobie et de la transphobie. Ce n'est pas qu'ils oublient de le faire. Mais le système hétéropatriarcal nécessite de maintenir le plus grand nombre dans l'ignorance, de ne pas relâcher la propagande : "l'hétérosexualité est supérieure à l'homosexualité", etc. Pendant que Villepin fait le beau...

...Sarkozy, lui, s'agite. Enfin : lui et ses flics. Ça rafle à tout va les sans-papiers, les putes, les toxicos - rendant en partie impossible tout accès aux soins. Et comme les rafles ne suffisent pas, ils criminalisent aussi celles et ceux qui ont le mauvais goût de s'opposer à leur politique. L'état d'urgence c'est pour faire taire les banlieues, pas pour le SIDA, l'éternel oublié des politiques. Un SIDA en recrudescence ici, qui meurtrit les pays dits du Sud, dans l'indifférence générale - et derrière se profilent le sourire narquois du Vatican, le cynisme abject de l'industrie pharmaceutique et la complicité objective du gouvernement. Certes, le soir, à la télé, la main sur le cœur, Sarkozy reconnaît quelques dérapages de la droite lors du vote sur le PaCS. Mais promis, c'est fini, ça ne se reproduira plus. Toutefois, quand Christian Vanneste affirme que les transpédégouines sont "une menace contre l'Humanité", Sarkozy le blâme du bout des lèvres, et repart expulser quelques sans-papiers pacsés, quelques enfants trop noirs, trop arabes, trop kurdes...

À l'UMP, ils en font des tonnes pour faire oublier l'homophobie qui les lie touTEs. 289 éluEs pondent un texte nauséabond pour défendre la famille (!) contre nous. Alors, pour faire oublier ces dérapages qu'ils ne désavoueront pas, ils redoublent de poses tolérantes. "Moi homophobe ? Jamais !" C'est comme Keller et Grossmann. Assurément, ils nous aiment. Si ça se trouve, ils ont même des amis transpédégouines comme Le Pen avait une femme de ménage noire... En attendant, chaque année nous sommes priéEs d'aller commémorer les déportés pédés plus tard, loin des prudes yeux de la majorité municipale ! Et puis surtout qu'on continue à vivre cachéEs : nous dépareillons tant au pied de la cathédrale, au Marché de Noël...

"En face" il y a le PS. Pour nous, il se fait tout miel : demain, il rase gratis ! On aura tout : le mariage et tutti quanti. Suffit d'aller voter. Oublié que la plupart des députés socialistes avaient "omis" de se lever le jour où il fallait voter le PaCS, oubliée la lâcheté du PS au moment du mariage de Bègles, oubliées les provocations homophobes de Jospin et Royal, oublié le vote PS pour la direction de la "Commission des droits de la femme et de l’égalité des chances" du Parlement Européen d'une députée qui préconisait d'enfermer les pédés. Maintenant c'est simple : ils nous aiment. À l'ancienne : ça frise le romantisme. Mais si nous sommes souvent futiles, incapables certaines fois de nous souvenir du nom de notre dernierE amantE, nous avons la mémoire chevillée au corps de celles et ceux qui nous ont un jour détestéEs, stigmatiséEs, humiliéEs. C'est qu'à recevoir tant d'amour de cette gauche de droite, on devient exigeantE : on en veut plus. Toujours plus. Nos désirs sont insatiables.

Comme les marchands, pour qui nous sommes aussi un créneau porteur et qui nous recyclent à tour de bras. Nos corps et nos désirs sont à vendre... Assez cher, car c'est bien connu, les transpédégouines sont riches. Un pédé précaire, une gouine ouvrière, unE trans' RMIste, ça ne s'est jamais vu... Se crée une norme à laquelle il est conseillé de se conformer. Dommage pour les corps qui n'y ressemblent pas, pour les sexualités compliquées, différentes, pour les désirs moins assurés... Un vrai marché, avec les pubs qui vont avec. Pour les trans' ça attendra : pour l'heure, on rajoutera, comme la dernière campagne d'Opel, une couche dans le mépris et la caricature. Et tant pis si, parmi d'autres conséquences, ça tue. Le Capital prospère depuis des siècles sur des charniers...

"Que nous n'avons fait de progrès !" s'extasie enfin l'opinion, heureuse dans son miroir narcissique de se trouver si progressiste. Tout a changé, le monde est devenu si tolérant, isn't it ? Et pourtant, ce sont toujours les insultes qui accompagnent notre quotidien, le placard verrouillé au boulot, à la fac, dans les lycées, dans les familles... Une violence sociale qui pourrit nos vies, jusqu'au suicide pour certainEs, jusqu'au meurtre pour d'autres.

Bref, on reçoit de l'amour de partout. Sauf de Benoit XVI et d'autres fondamentalistes religieux dont c'est pourtant le boulot. Le saint homme n'a rien contre nous, individuellement. Dommage : car nous, on est en groupe. Et puis pour mériter son amour, faudrait arrêter de baiser... L'abstinence pour gagner l'absolution. On en reparlera dans une prochaine vie : tous ces garçons et toutes ces filles sont, pour l'heure, trop irrésistibles.


"SI LES HOMOSEXUELS ONT ENVIE D'EXISTER..."


Face à tout cela, à TaPaGeS, nous avons pris au mot le député homophobe Christian Vanneste : "Ce qui m'agace, c'est le militantisme. Si les homosexuels ont envie d'exister, qu' ils s'aident eux-mêmes".

Bien dit !

TransPédéGouines, nous avons envie d'exister ! Alors nous avons décidé de nous aider nous-mêmes. De riposter. De militer. À notre manière. Et ainsi d'opposer à la complicité des États la solidarité militante. D'opposer à nos fragilités solitaires notre force collective. À notre inertie qui les conforte, notre activisme qui les inquiète.

Nous ne nous retrouvons ni dans les images humiliantes et stigmatisantes que la société hétérocentrée nous renvoie de nous-mêmes ni dans celles que les marchands et les élites LGBT voudraient nous voir adopter. Comme si l'oppression hétéropatriarcale et hétérosexiste ne suffisait pas, de part en part on nous explique comment il faut être pour être hypothétiquement intégréE dans tel clan, telle tribu, etc. Seulement voilà : cette homonormativité nous étouffe. Nous ne sommes pas interchangeables. Chaque fois unique, singulierE. Ce que nous avons en commun, c'est une même expérience de l'oppression. Et la décision collective d'en finir avec ce monde qui nous humilie, nous insulte, nous agresse, nous meurtrit. La liste de nos exigences est immense, à hauteur de celle des injustices que nous subissons. Il faut détruire l'homophobie, la lesbophobie, la transphobie d'État. Il faut détruire les normes qui nous oppriment.

Et inventer des vies autrement plus intenses !

Et parce que nos luttes sont liées, comme nous sommes liéEs dans un monde que nous n'avons pas choisi, nous sommes solidaires des femmes qui se battent pour la pleine égalité, pour la libre disposition de leurs corps ; parce que nous sommes internationalistes, nous refusons d'abandonner les TransPédéGouines d'ailleurs à l'indifférence et à la solitude ; parce que nous sommes travailleurs/-ses, chômeurs/-ses, précaires, nous sommes dans les luttes sociales et solidaires d'une jeunesse qui refuse la précarité ou la stigmatisation des banlieues ; parce que nous sommes migrantEs, parce que nos amantEs le sont, nous nous opposons aux lois racistes de Sarkozy, à la xénophobie d'État banalisée...

Dans notre combat pour l'émancipation, nous n'avons pour seules forces que notre propre détermination et notre intransigeance. Et pas grand-chose à perdre. Et tant de liberté, d'égalité à gagner.



Rencontrons-nous ! Discutons ! Inventons nos futurs complots et nos imminentes échappées...

Réunion publique de TaPaGeS le lundi 26 juin à 20 h au sous-sol du bar La Perestroïka, 2 rue Thiergarten à Strasbourg.



TaPaGeS, le 17 juin 2006
Transpédégouines de Strasbourg






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